"Exhumer le futur" - Maarten Vanden Eynde

L'exposition de Maarten Vanden Eynde interroge les liens étroits qui existent entre le modèle de croissance économique et le déclin de la Terre.

Maarten Vanden Eynde, "Restauration du Lac de Montbel", 2003 © photo : Marjolijn Dijkman

Assis sur une terre craquelée, Maarten Vanden Eynde comble de plâtre les fissures du sol desséché d’un lac. Restauration du lac de Montbel est un parfait prologue à l’exposition.
Immergé dans son image, l’artiste intervient sur un phénomène climatique par un geste simple et dérisoire, une action à l’échelle humaine, ambitieuse mais délibérément vaine. Il restaure moins le lac qu’il ne met en évidence une catastrophe naturelle qui l’encercle et le dépasse.
Avec cette œuvre, il pose le cadre d’un travail interrogatif, parfois spéculatif, sur le rôle et les conséquences de l’action humaine dans le fonctionnement du système terrestre.
Au départ il y a une remise en question de l’idée du progrès, celui qui littéralement annonce une marche vers l’avant, un mieux, une amélioration, celui qui nous a collectivement menés au monde contemporain, et qui pour l’artiste est grandement responsable de l’état actuel du monde. Agent moteur des plus grands changements, le progrès n’a cessé de s’accélérer, en particulier à l’ère industrielle, jusqu’à totalement s’emballer ces dernières décennies.
Maarten Vanden Eynde étudie les activités humaines qui ont un impact sur l’environnement. En traversant les siècles, en imaginant ce que nous aurons laissé derrière nous et ce que nos descendants retrouveront, il examine non seulement ce que sera la terre dans le futur mais il analyse aussi les pouvoirs et les systèmes qui ont façonné le monde que nous lèguerons.
Quels sont les enjeux du progrès ? Quelles relations a-t-il nouées entre les parties d’une compétition mondiale qui s’est jouée et se joue toujours entre des dominés et des dominants, entre des producteurs et des consommateurs, entre des exécutants et des décisionnaires ?
Cette réflexion sur un monde global, tiraillé entre le meilleur et le pire, Maarten Vanden Eynde, la mène en combinant des récits fictifs à des données scientifiques qu’il tire de ses nombreuses collaborations avec des experts, en sociologie, en ethnologie mais aussi des spécialistes de l’environnement ou des historiens. Ses œuvres nous renseignent mais elles parlent aussi à nos émotions. Elles sont faites de matières ou de symboles qu’il décale légèrement pour qu’apparaissent leurs contradictions ou leurs failles.
Après l’exposition au Mu.ZEE d’Ostende en 2021, Exhumer le futur à La Kunsthalle Mulhouse est la deuxième rétrospective de Maarten Vanden Eynde tirée d’un livre éponyme qui contextualise son travail et retrace 20 années d’une recherche persévérante, toujours active. À Mulhouse, une sélection de ses œuvres répertoriées s’organise autour de la question industrielle, celle des processus de production, de la transformation des matières premières et des produits. Pour l’exposition, Maarten Vanden Eynde a aussi conçu Fat Man 3D, une nouvelle pièce qui fait littéralement allusion à la bombe larguée sur Nagasaki au Japon en 1945 puisqu’elle reprend le nom de code de l’arme nucléaire. Avec cette œuvre, il relie les trois pays dans lesquels s’inscrit histoire personnelle. Le Congo, celui qui fournit des matières premières telles que le coton ou l’uranium. La France et en particulier l’industrie mulhousienne, qui transforme la fibre de coton en fil manufacturé. La Belgique qui façonne le coton en une dentelle au fuseau d’exception. Le tout prend la forme d’une installation explosive suspendue dans le hall d’entrée du centre d’art.

Commissariat d’exposition : Katerina Gregos et Sandrine Wymann.

Mu.ZEE, Ostende (Belgique) est partenaire de l’exposition et a présenté le premier volet d’Exhumer le futur en 2021.
L’exposition bénéficie du soutien des entreprises DMC et Prevel Signalisation.

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