Exposition : "Alter Ego" par Emmanuel Le Moan
La démultiplication des images sur le web modifie leur statut même. Il n’y a plus, pour le spectateur, de hiérarchie parmi celles, trop nombreuses, qui s’offrent à lui. Car l’origine même des images, leur source, est désormais incertaine à une époque d’incessante circulation et de recomposition permanente du flux des informations dans le Big data.
Exposition : Alter Ego par Emmanuel Le Moan, visible du mardi 8 au dimanche 27 janvier 2019
Vernissage vendredi 18 janvier 2019 à 19h
Visite-guidée-conférence samedi 19 janvier 2019 de 16h à 17h
En proposant, pour cette exposition, un certain nombre de reproductions, d’agrandissements, de mes travaux à l’encre de Chine, des copies donc et pas les originaux, je donne à voir des images dont le grain révèle qu’elles sont des images d’images, au statut incertain. Je souhaite ainsi rendre compte de cette espèce d’épuisement des images – qu’Andy Warhol a su restituer dans ses sérigraphies – dans un monde où réel et virtuel se mêlent, où les simulacres semblent désormais plus vrais que les formes de la réalité qu’ils singent.
Dans ce contexte, l’autoportrait se charge d’une force nouvelle, devenant l’occasion de projections diverses, d’une rêverie sur ce « moi » qui demeure obstinément opaque.
La représentation de soi, ici, ne vise nullement à satisfaire un quelconque désir narcissique : d’une encre à l’autre, un dialogue s’instaure avec différents mythes, différentes histoires, des légendes, des formes iconiques. Parfois un titre ou quelques mots apparaissent, leur rencontre avec l’image créant un décalage sémantique, des significations nouvelles. Le jeu avec des motifs connus sollicite une mémoire collective enfouie en nous. Cette figure récurrente, parfois grotesque, se charge alors d’une force allégorique qui excède ce qu’il y a en elle d’insignifiante individualité. Et si l’individu représenté semble parfois subsister, ce n’est qu’en tant que symbole : symbole des tracas de l’individu moyen lambda, confronté aux mystères d’autrui, du monde et du moi, toutes choses dont la lisibilité lui échappe sans cesse.
Alors qu'aujourd'hui notre image nous échappe, en me réappropriant la mienne dans le cadre d’une sorte de journal, j’essaie d’élaborer un récit où se rencontrent le moi obscur, l’autre mystérieux et le vaste monde.
Il s’agit finalement pour moi d’explorer notre rapport au monde, à autrui et à nous-mêmes. Cela fait écho aux réflexions de Paul Ricoeur sur le temps raconté et sur le rôle de la fiction.