"Maladie mentale et état policier : vers une pénalisation de la folie ?"- rencontre avec Sarah Massoud

Sarah Massoud est actuellement juge au tribunal judiciaire de Paris. Lorsque nous l’avons rencontrée il y a quelques mois aux « Assises du soin psychique » organisées par la constellation des collectifs « Le printemps de la Psychiatrie », elle était juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Bobigny, fonction qu’elle a quittée depuis.
Lors de cet évènement, Sarah Massoud, en tant que membre du Syndicat de la Magistrature, avait développé un argumentaire intitulé : « Le fou dans l’œil de l’État de police(s) » qui nous avait particulièrement intéressé. Nous lui avons donc proposé de venir continuer de déplier ces questions avec nous.
Depuis des décennies, nous en faisons le constat régulièrement, nous évoluons dans un état où le pouvoir exécutif se montre de plus en plus sécuritaire. En s’appuyant sur la théorie « du droit pénal de l’ennemi » qui créé et anticipe la subjectivité criminelle, Sarah Massoud nous montre comment ce glissement vers un état policier a des conséquences directes sur les personnes psychiatrisées.
La construction de la figure de l’ennemi.e et la répression qu’elle implique concerne, en effet, tout individu ou groupe perçu à la marge de la société : la personne psychiatrisée mais également l’étranger.e, le/la marginal.e, le/la déviant.e, le/la militant.e politique… Suspectée d’être une menace pour l’équilibre de l’État, dans une société prônant le risque zéro, cette « marge » va devenir un danger à contrôler, surveiller, ficher, voir neutraliser.
Nous avons donc le plaisir d’inviter Sarah Massoud pour comprendre, à travers l’histoire du droit et ses évolutions, la situation actuelle : comment des instruments juridiques ont été créés pour asseoir une idéologie pénale ségrégative, ayant un impact toujours plus coercitif sur les personnes usagères de la psychiatrie ou susceptibles de l’être ? Car l’histoire du droit est aussi celle des exclu.e.s et de leurs conditions matérielles de vie...